A lire sur Slate.fr, le bilan de Copenhague par Eric Le Boucher.
Quelques extraits de l’article de Slate.fr ont retenu mon attention :
“Le beau bastringue type ONU, type «Grenelle de l’environnement», type «mettons nous autour de la table du consensus», type «tout le monde il est gentil vert», a lamentablement échoué. On n’impose pas des restrictions homothétiques, on ne fait pas comme Jean-Louis Borloo des fausses promesses «le nord paiera 600 milliards pour le sud», on comprend que toutes les nations ne sont pas comme les nôtres, riches, vieilles, repues, adeptes de la décroissance. Non, au sud on veut des usines, du chauffage et des voitures !”.
“La clé c’est l’abandon de l’esprit de Kyoto, imposé par le malthusianisme européen, c’est la recherche d’une autre croissance, celle rendue possible par les sciences et les technologies. Ce qu’auraient du demander les mouvements écologistes depuis le début, c’est un effort mondial gigantesque de recherche-développement. Ils ont fait perdre quinze ans à leur cause en essayant de nous conduire sur la voie du rationnement et de la repentance”.
Et de conclure sur l’insuffisance de la R&D dans le domaine de l’environnement : “Voilà le vrai drame de la planète et le reproche qu’on peut faire à Copenhague, c’est de n’avoir pas dit un mot sur le besoin d’accélération de la R&D dans l’accord final !”.
Le malthusianisme ou la décroissance, cela me fait penser à mes amis écolos canadiens (mes anciens voisins). Un jour, ils frappent à ma porte et me demandent de l’argent pour une levée de fond visant à acheter une île privée en vente (juste en face de chez nous). Leur peur : qu’un promoteur coupe les arbres et construise des maisons ou un hôtel sur cet île (du béton pour faire simple !). Pourquoi ? D’après eux, parce qu’il y a une veille baraque toute pourrie, moche, sans intérêt mais construite en 1800 ; que des oiseaux viennent s’y reproduire (je croyais qu’un oiseau, ça volait !) ; qu’il y a un cimetière indien (mais ils avouent qu’ils ne savent pas où il est sur l’île). D’après moi, ils font du kayak l’été, leur maison a une vue sur cette île et ça leur gâcherait le paysage. Voilà donc ce que j’ai répondu : si vous rasez votre maison et que vous replantez les arbres qui s’y trouvaient, si vous transformez la route qui vous permet d’aller en ville faire vos courses en chemin de promenade piétonnier, alors vous serez cohérent avec votre levée de fond. En d’autres termes, sous couvert d’écologie, certaines personnes ne font que protéger leurs propres intérêts et veulent priver les autres de ce qu’ils ont pu prendre avant eux. J’ai mon petit confort, j’ai rasé des forêts pour l’obtenir et maintenant je veux garder les choses comme elles sont.
Comme le dit Eric Le Boucher, c’est facile de demander la décroissance quand on a bien profité de la croissance. C’est la solution simpliste comme celle qui consiste à créer une taxe à chaque fois qu’on veut régler un problème. Tout comme Eric, je pense que l’innovation est une voie qui respecte le droit de chaque peuple à la croissance (ceux qui l’ont déjà et ceux qui la veulent). Cependant, je reconnais que l’innovation demande beaucoup de travail et de réflexion qu’il est plus facile d’interdire et de taxer. Je reconnais aussi que l’idée de croissance représente une “certaine” vision du monde et que d’autres ont le droit d’avoir une autre vision du monde à base de décroissance et de malthusianisme.
Voilà donc la question à laquelle je vous propose de répondre dans les commentaires de ce billet : qui décide quand la croissance s’arrête ? Ceux qui en ont bien profité ? Ou ceux qui en rêvent ?
Pour aller plus loin et conclure, la décroissance ou le malthusianisme, ce sont des valeurs, c’est une culture. L’innovation, le progrès technologique, la croissance, ce sont d’autres valeurs, c’est une autre culture. Le sommet de Copenhague a donc finalement été le choc frontal de deux cultures antagonistes. On peut toujours sortir d’un conflit d’idées mais il est très difficile de sortir d’un conflit de valeurs.
J’aime bien sur ce blog donner la parole aux frères ennemis. Hier, c’était Corinne Lepage, aujourd’hui Eric Le Boucher. C’est de la controverse que naîtra la lumière. Pour l’instant, malgré tout ce que j’ai lu ou écrit, je ne vois toujours pas cette lumière. C’est encore le brouillard, la réflexion continue !