Ce blog fête aujourd’hui ses 10 ans et l’aventure continue !
Je vous annonce la sortie du dernier livre de mon ami Dominique Turcq : Travailler à l’ère post-digitale
Dominique Turcq est consultant et prospectiviste en management. Il est aussi le fondateur de l’institut Boostzone qui est spécialisé sur les implications managériales des nouvelles technologies, des évolutions politiques, économiques et sociétales.
Son dernier ouvrage est un livre de prospective sur l’évolution du travail à l’horizon 2030. Vous trouverez ci-dessous un aperçu du contenu de ce livre.
La révolution permanente du travail
Le digital est devenu désormais un enjeu opérationnel de transformation du monde du travail, des entreprises, des qualifications de chacun. La transformation est parfois brutale, elle crée des inégalités, des tensions. Toute mutation génère à la fois des bénéfices et des pertes, cette mutation vers un monde plus digital n’échappe pas à la règle.
Pourtant la révolution digitale est déjà dans une phase de consolidation, d’adaptation. Chaque acteur, qu’il soit un individu, une entreprise, le régulateur, sait bien qu’il faut s’ajuster et commence à apercevoir les contours nouveaux de cette adaptation.
Mais ce que nous avons vécu depuis quinze ans n’annonce pas l’avènement d’une période qui serait de nouveau stable. Bien au contraire, à peine habitués au digital, il va nous falloir nous préparer, et nous adapter, à d’autres révolutions majeures du monde du travail.
1ère partie : les fondements du post-digital
Dans ce qu’on peut appeler le « post-digital » – c’est-à-dire quand le digital est devenu aussi normal qu’aujourd’hui l’électricité – d’autres bouleversements viennent d’horizons nouveaux. Cette partie distingue les sources de cette évolution et pour chacune d’entre elles en analyse les conséquences sur le monde du travail, à la fois quant à la nature du travail, quant à l’évolution du marché du travail, et quant à la place du travail dans la stratégie des entreprises.
- L’intelligence artificielle appliquée et les bouleversements qu’elle apporte en particulier quant à la valeur (économique et sociale) du travail humain. L’IA n’est pas une simple extension du « digital » même si elle repose sur les acquis de ce dernier (Big Data en particulier). Elle représente un défi de nature nouvelle qui bouleverse tous les aspects du travail.
- Les sciences cognitives appliquées et les bouleversements qu’elles vont apporter en particulier quant aux interactions sociales, aux modes de relations entre les hommes, aux modes d’acquisition des savoir-faire, aux processus de décisions. Les neurosciences sont une révolution à venir rapidement quant à la prise de décision, au leadership, au management de toutes les fonctions humaines de l’entreprise, qu’il s’agisse de la relation client ou des DRH.
- La biologie et la génétique appliquées et les bouleversements qu’elles vont apporter à la société et donc au monde du travail, aux processus de sélection et de développement des hommes. N’oublions pas que la biologie, par les vaccins et les antibiotiques notamment, a été la principale révolution technologique et économique, à travers la démographie en particulier, du vingtième siècle.
- Un nouveau système social, en pleine construction, articulé en particulier autour de plus de collaboratif, d’une demande de consommaction de la part des consommateurs, d’une réinvention de la notion de proximité humaine, d’une demande croissante de sens, d’un besoin important de créativité, d’une exigence de pureté, de santé, de vérité (du mouvement bio à la pratique de sports ou de pratiques méditatives, etc.). Ce système social va changer nos façons d’interagir, va encore accentuer les rapprochements vie privée vie professionnelle
- Un nouveau contrôle social. La tripadvisorisation — c’est-à-dire l’évaluation généralisée de ce que nous sommes et de ce que nous faisons, la traçabilité de nos activités, de nos parcours privés ou professionnels, donc la naissance de notre double numérique, beaucoup plus sophistiqué qu’il ne l’a jamais été, — va impliquer une nouvelle maîtrise de notre identité sociale, un nouveau système de management des hommes et des entreprises. Chacun va devoir développer une capacité nouvelle à « sur-vivre ». Les enjeux sont notamment d’acquérir de nouvelles compétences pour manager sa propre image, ses collaborateurs, les clients et les « parties prenantes ». La gestion de nos identités numériques diverses va conduire à de nouvelles inégalités, à de nouveaux comportements sociaux.
- Un climat étrange d’acceptation d’un monde post-vérité. Les fake news (infox), et l’ensemble de ce que les sociologues modernes appellent le bullshit, sont certes en partie liés à nos propres attitudes d’évaluation sociale et à nos propres comportements sur les réseaux sociaux. Mais ils sont aussi liés à de nouvelles attitudes sociales collectives. Cette situation va amener de nombreux bouleversements, notamment quant à la relation à l’expertise, à la science, à la technologie, aux autorités diverses. Le discernement va devenir une valeur essentielle de la personnalité et pourrait devenir un facteur différentiant dans le monde du travail.
- Le rôle de l’entreprise. Il va être nécessaire de réinventer (et de réaliser dans la pratique) une nouvelle définition de l’entreprise dans son rôle, de plus en plus attendu, de « bien commun » et de lieu juridique du travail. Elle devra en outre dans le même temps « contrôler » de plus en plus, ce qui sera rendu d’autant plus possible à travers les progrès sociologiques et technologiques mentionnés plus haut, et « rendre heureux » ceux qui y travaillent car son nouveau rôle social et son attractivité en dépendra. Elle devra enfin être réellement à l’écoute de son environnement (RSE). Cette multiplicité d’obligations va créer pour elles un paradoxe quasiment d’ordre schizophrénique. Les collaborateurs (tous statuts confondus) vont se trouver aussi confrontés à ces enjeux car ils deviendront de façon croissante des acteurs des nouvelles pratiques, des ambassadeurs dans le monde du travail, tout en restant fondamentalement des ressources économiques.
2ème partie : Panorama du travail à 10 ans.
De ces analyses des éléments de contexte découle une définition du travail à venir.
Il nous faut distinguer les évolutions du travail pour les individus (quel devenir, comment s’y comporter ?), pour les managers (quel rapport aux hommes, quels nouveaux savoir-faire faudra t’il développer ?), pour les entreprises (quels nouveaux systèmes, quelle approche stratégique des talents, quel nouveau rapport à l’évolution sociale ?), pour la société et l’économie (quelle place du travail, quelle rémunération, quels enjeux du travailler ensemble ?).
Parmi les points saillants de la place du travail dans la société de demain sont abordés :
- La notion de capital humain (revisitée avec les nouvelles compétences et la nécessité d’une nouvelle autonomie des individus). Les enjeux économiques et sociaux de sa valorisation (et de sa dévalorisation) et de sa rémunération alors que s’opère une certaine dé-taylorisation des tâches et des métiers et, parallèlement, une prise en charge des tâches taylorisées par des robots.
- La dichotomie du marché du travail (les disparités) qui va progresser et prendre des formes nouvelles.
- La notion d’attentes vis-à-vis du travail (sociologique, psychologiques, managériale) et donc de son sens
- Les nouvelles caractéristiques de la relation au travail, aux statuts, au temps de travail, au lieu de travail.
- Le besoin de revoir (encore) le droit du travail mais aussi de travailler de façon vraiment pluridisciplinaire pour mieux la comprendre.
- La nouvelle relation entre le travailleur (« œuvreur ») et les éléments de structures / systèmes / cultures de l’entreprise et ce que cela implique pour la réforme de celle-ci. Comment faire qu’un chevalier en armure rigide devienne un Jedi alerte et agile ?
Merci à Dominique de partager avec nous le fruit de ses recherches. Son travail m’inspire beaucoup depuis des années.